Interview - Laurent Miramon, la Déontologie du Surf

SurfLand

- @oceansurfreport -

Voici l’interview exclusive Surf Report Maroc avec le propriétaire de SurfLand Laurent Miramon. Un précurseur du surf au Maroc.

OSRM : Pourrais-tu te présenter pour nos lecteurs et nous parler de toi, de ton parcours ?

Laurent : Laurent Miramon, je suis né à Casablanca, j’ai fait toute ma scolarité à Casablanca, je suis de la 4e génération de ma famille au Maroc. Très jeune, j’ai eu une expérience en compétition surtout dans le domaine de la planche à voile, qui m’a fait bénéficier d’une didactique du sport. J’ai commencé à surfer à l’âge de 11 ans et dès que j’ai pu arrêter la planche à voile à 15 ans c’était vraiment pour ne faire que du surf et me dédier complètement à cette discipline. A cette époque l’apprentissage du surf était complètement empirique. J’avais mon projet de créer une école de surf parce qu’il n’y en avait pas au Maroc. J’ai eu ce projet très jeune, en 1985. Un projet qui a pu voir le jour en 1991. La première école de surf au Maroc, ça fait donc 25 ans maintenant. J’étais précurseur. Il n’y avait pas de planches en mousse, de combinaisons « enfants » et je savais que le besoin d’encadrement, d’instruction se profilait.

OSRM : Pourquoi avoir choisi Oualidia ? Sur quels critères t’es-tu basé pour retenir cet endroit ?

Laurent :  J’ai choisi Oualidia parce que l’endroit est vraiment exceptionnel, c’est à dire qu’au niveau initiation on a des conditions de pratique qui sont incroyables. On a une baie que l’on compare à une piscine à vague naturelle, quelques soient les conditions de houle on a la garantie que le spot sera praticable, en cas de tempête on a la baie qui est protégée par exemple. Donc dans ces conditions qui vont permettre une entrée à l’eau quotidienne aux jeunes, nous assistons à leur progression nette et incroyable. Donc déjà de ce fait là, ça me permet plus aisément de détecter les jeunes talents, comme Ramzi ou Sébastien Sahyoun, entre autres. Ramzi je l’avais détecté en l’espace d’une semaine de stage quand il avait 8 ans et demi et Sébastien la même chose. L’avantage aussi de ce spot, c’est que lorsque l’on passe de l’autre côté, on peut bénéficier d’une qualité de vague vraiment particulière, percutante et creuse, une particularité de la région. Elles font parties des vagues les plus puissantes du Maroc. Donc quand les jeunes débutent sur la baie puis évoluent en passant de l’autre côté, ils acquièrent tout de suite une expérience d’un surf solide. Quand on dit Oualidia il faut comprendre Oualidia-Safi, c’est 60km de côte avec 30km de beachbreak et un peu de reef et 30km de cap. Cette région est donc vraiment très intéressante.

OSRM : Quel a été l’évolution de SurfLand ? Comment es-tu arrivé à ce niveau professionnel ?

Laurent : Toute l’évolution de SurfLand s’est faite très rapidement. Je suis en partenariat avec Quiksilver depuis 1993. Et avec eux nous avons mis en place des programmes de training camp, où des jeunes juniors du team Quiksilver arrivaient encadrés par des mentors, des professionnels, notamment de grands surfeurs comme Tom Carroll, Gary Elkerton ou encore Jeff Hackman. Grâce à ces trainings camp nous avons pu acquérir une grande expérience en termes de coaching et d’entrainement. J’ai donc fait bénéficier de ces programmes à nos jeunes sportifs marocains. C’est le principe des vases communiquant. Et même au niveau de la vague de Safi, le fait de recevoir ces professionnels m’a permis d’acquérir très jeune et très vite la technique du tube riding. Le tube c’est un ride de vague bien particulier, on peut dire que c’est une manœuvre ultime et grâce à cette vague j’ai pu acquérir cette technique et avoir cette connaissance. Donc ces trainings camps c’était une superbe opportunité et j’en ai également fait profiter mes amis surfeurs adultes qui venaient aussi et qui assistaient à ces camps d’entrainement.

OSRM : Quelles sont les activités que tu proposes et qu’entrevois-tu pour la suite ?

Laurent : Maintenant que nous avons cette fédération depuis maintenant 9 ans ou 10 ans, on travaille à la mise en place de plusieurs programmes. Nous n’avons pas pu tout faire d’un coup ça a été progressif. Il y a eu énormément de réalisations au sein de la fédération. Il a fallu d’abord commencer par la formation des moniteurs, qui représente un réel et grand besoin.

SurfLand est une structure qui accueille plus de 1000 enfants par an. Et une des particularités de cette école et que nous organisons des stages intensifs ou des cours externes pendant les vacances mais en dehors des vacances nous travaillons avec les écoles scolaires, différentes écoles privées ; françaises, marocaines ou encore le collège espagnol. Nous espérons vivement travailler avec les écoles publiques très prochainement. Les écoles viennent du lundi au vendredi pour participer à une formule que l’on appelle « classes de mer ». Ils font un seul cours de surf puis ils participent à des activités pédagogiques de découverte. Comme la visite des fermes ostréicoles, l’étude du littoral à marée basse, la sensibilisation à l’environnement ; ensuite chaque enseignant arrive avec un projet pédagogique spécifique.

Donc travaillant dans ce domaine, une école comme SurfLand ainsi que d’autres, avaient et ont ce réel besoin de formation de moniteurs. Besoin pour lequel la FRMS à tout de suite oeuvré. Et nous poursuivons aujourd’hui dans ce domaine. Jusque là nous n’avions que des formations de type brevet fédéral, qui correspond à un échelon. Maintenant nous devons passer à l’échelon supérieur, le BPJEPS  et les formations des coachs. Car notre grand problème au Maroc c’est que nous n’en avons que très peu. Nous avons la chance d’avoir de bénéficier de d’Aziz Bouchga tant sur le plan entrainement des équipes nationales, que des formations

OSRM : Est-ce une première pour SurfLand ce stage en particulier ? Qu’en penses-tu ?

Laurent : C’est le deuxième que nous faisons à SurfLand en dehors des stages que j’organise avec Quiksilver Maroc. C’est une opportunité pour les jeunes surfeurs qui est fantastique. Ils sont chanceux et privilégiés de pouvoir participer et bénéficier de cet encadrement. Nombreux parents demandent à ce que nous développions ce genre d’évènement au Maroc. Parce que la plupart, en tout cas ceux qui le peuvent, envoie leurs enfants en France en séjour coaching chez Franck Errart par exemple, qui est un ancien du Maroc, ou chez Aziz Bouchga ou encore chez Yann Martin à Lacanau qui est aussi un weld lblad et qui fait aussi du coaching. Quand j’entends que le jeune Boubker ira avec Aziz en France pour un séjour coaching sur la côte atlantique française, je me dis et suis garantie qu’il ne pourra que progresser. Donc ce qu’il nous manque au Maroc ce sont les coachs, et un tout pour fermer la boucle. Par exemple nous avons beaucoup d’écoles mais pas beaucoup de clubs, avec une cotisation annuelle et un système de coaching et non de monitoring autour du surf. Je ne cesse de dire qu’il faut que l’on développe cela ici. C’est d’ailleurs ce à quoi j’aspire et vers quoi nous nous orientons avec la fédération. Le développement des  écoles est bien car il y a une grande demande d’initiation. Cependant, il faut éviter le surnombre d’écoles de surf sur un même spot pouvant engendrer une concurrence négative, et surtout une problématique de place sur les spots d’initiation. Le système « club » est nécessaire, avec  tout ce que cela peut apporter au travers de programmes d’échange avec des clubs étrangers. Nos jeunes surfeurs ont besoin de partager avec des surfeurs étrangers, et particulièrement de surfer en présence de pros. Pour Ramzi, à l’époque, c’était une nécessité de partir à l’étranger pour pouvoir bénéficier d’un cadre favorable pour sa progression.

Aujourd’hui, avec le passage régulier de professionnels au Maroc, les programmes d’encadrement et de compétition mis en place par la FRMS, et l’implication de quelques surfeurs au travers de leurs écoles, cette nécessité de voyager est moindre. D’autant plus que nous avons d’excellentes conditions de sur au Maroc, avec des vagues dites « World Class Wave » et un climat beaucoup plus avantageux qu’en Europe.

Nous avons donc besoin de cette éthique, de cette déontologie du sport qui permet vraiment aux jeunes de se lâcher, de s’exprimer complètement et de progresser. Il faut que nous mettions en avant l’amour du sport pour que le Maroc confirme cette nation du sport qu’elle est. Nous avons une population jeune et sportive, qui représente un atout majeur, mais l’encadrement, l’entrainement structuré est essentiel.

OSRM : Comment t’organises-tu entre tes activités habituelles et ce stage ? Quel est ta relation avec la fédération ?

Laurent : J’ai réservé la semaine pour ce stage pour laisser la place à l’équipe nationale et profiter pleinement de la structure et de la logistique que nous leurs apportons.

Nous travaillons depuis 10 ans à la structuration et au développement de la discipline. C’est une tâche très difficile que nous accomplissons grâce à un travail d’équipe, une implication d’hommes passionnés et déterminés.

L’avancement du programme est considérable, sur tous les fronts : mise à niveau des clubs, harmonisation et développement du système de compétition, programmes sociaux, formations.

Nous sommes la seule fédération inscrite à une fédération européenne, permettant à l’équipe nationale de participer aux Championnats d’Europe, et d’organiser depuis 2008 nombreuses étapes des différents circuits des championnats européens.

Nous sommes aussi ravi d’organiser depuis 2015, une étape du circuit professionnel de qualification, QS. Ce programme a été lancé avec un  leitmotiv  de notre Président, M. Kadmiri, tenant compte du fait qu’il est difficile pour les jeunes surfeurs marocains de voyager pour se mesurer aux meilleurs surfeurs étranger. Nous les avons donc fait venir au Maroc !

Je suis conseiller technique au sein de la fédération, et en parallèle je suis directeur d’événements pour les événements majeurs comme le QuikPro ou les championnats d’Europe.

Nous échangeons et discutons en permanence, et toutes les décisions régulièrement. Toutes les décisions sont prises de façon collégiale, l’équipe fédérale est très active, avec une répartition des tâches objective.

Nous avons aujourd’hui un potentiel très intéressant avec un vivier de jeunes talents, qu’il faut encore accroître.

Nous devons les assister, encadrer au mieux, et surtout sur les spots. Le surf est aussi un sport relativement dangereux (quoique placés entre la 20 et 25ème place dans la classification des sports dangereux). Comme pour le surf féminin, que nous devons  développer.

Lorsque des enfants ou des femmes sont dans l’eau, il faut les aider, et leur faire de la place afin qu’ils puissent évoluer dans les meilleures conditions. Ce n’est pas toujours le cas.

OSRM : Merci Laurent et pour finir que penses-tu de Surf Report Maroc ?

Laurent : Excellent initiative ! Car en plus des prévisions surf sur les différents spots, tout le contenu d’informations est très intéressant. Au Maroc nous n’avons aucun support d’informations spécifiques. Vous êtes le seul site d’informations surf ici. Et nous avons grand besoin de parler du surf au Maroc avec tout le potentiel qui existe ici. On vous encourage et nous ferons tout pour vous accompagner à continuer de partager les informations nationales et internationales pour faire connaître de plus en plus ce sport, promu à une progression de masse  au Maroc. Votre site est idéal pour cela. Tant sur le plan relationnel, ou développement personnel ou encore environnemental, c’est très important pour sensibiliser. Car c’est un sport très complet et très intéressant autant psychologiquement que physiquement.

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