Surf - Pipeline : Mick Fanning, au nom de son frère

"Ce jour-là sur le Pipe Masters, j'ai perdu. Mais j'ai réalisé que dans la vie, j'étais en train de gagner."

- @oceansurfreport -
C'était il y a cinq ans jour pour jour. Le 16 décembre 2015, Mick Fanning, alors en la conquête d'un quatrième titre de champion du monde, apprenait le décès de son frère Peter. Un souvenir douloureux gravé dans la mémoire du surfeur australien à la carrière exceptionnelle.

Un bruit sourd rompt le silence de cathédrale qui a envahi la Rip Curl House depuis que la nuit a plongé le North Shore d'Oahu dans une obscurité totale. Il est cinq heures du matin et Corey Wilson se réveille en sursaut : "J'ai vu quelqu'un courir à travers ma chambre avec une lampe torche. J'ai cru qu'on était entré par effraction dans la maison !" Le photographe de la marque australienne se précipite dans la cuisine et tombe nez-à-nez avec Mick Fanning. Assis autour de la table, le surfeur originaire de Penrith éclate en sanglots. Quelques minutes plus tôt, sa mère frappait à la porte de la chambre du triple-champion du monde, en larmes, annonçant que Peter, le frère ainé de Mick, était décédé des suites d'une crise cardiaque lors de son sommeil.

Année noire

À 34 ans, l'Australien vivait alors une nouvelle tragédie, lui qui avait déjà connu maintes fois la perte d'êtres très chers. En 1998 et alors qu'il n'était pas majeur, le gamin de Coolangatta apprenait la disparition de son autre frère, Sean, dans un accident de voiture. Le cadet de la famille Fanning était sa source d'inspiration, et les deux frangins partageaient la même volonté de briller sur le World Tour. En 2013, il voyait un autre de ses proches mourir. Son chien Taylor, nommé en hommage à son surfeur préféré d'alors,Taylor Knox, qu'il avait recueilli dix-sept ans auparavant à la fourrière. "J'ai traîné cette souffrance pendant des mois", avait-il raconté au journaliste Sean Doherty. 2015, la même saison où il fut victime d'une attaque de requin lors de l'épreuve de J-Bay, restera donc dans les mémoires comme une année noire pour le surfeur australien.

Mental d'acier

Quelques mois auparavant, les deux frères avaient eu une discussion. Peter, qui révélait rarement ses sentiments, avouait à Mick que l'une des choses qu'il préférait faire était de regarder son petit frère rivaliser avec les meilleurs surfeurs mondiaux sur le Tour, et que cela le rendait fier. En ce 17 décembre 2015, jour de finale sur le Pipe Masters, ces mots ont sans doute résonné dans l'esprit du leader au général. Au petit matin, ses amis le réconforte et l'incite à ne pas endosser son lycra pour prendre part à la série qui l'oppose à Jamie O'Brien. Mais tout en sachant que son frère veillerait sur lui, Mick écoute son cœur et prend la direction du reef redouté de l'archipel mythique du surf. Avec la sérieuse volonté d'en découdre.

Heat légendaire

L'option de la gauche s'est avérée la plus intéressante.
Face à J.O.B, l'un des vétérans de Pipeline, Mick se sent pousser des ailes et gagne rapidement en confiance, perdant toute notion de pression. Il prend la direction du Round 4, où John John Florence et Kelly Slater l'attendent. La suite ? Un des heats les plus légendaires que le circuit professionnel ait connu. Les sections tubulaires ouvrent à n'en plus finir et les surfeurs entrent dans un état de grâce à chaque fois qu'un set atteint le spot situé sur le Seven Mile Miracles. "Cette série a été à la fois la plus éprouvante et la plus satisfaisant de ma carrière", avouera Mick après coup. À quatre minutes de la fin du heat et alors qu'il pointe à la troisième place, l'Australien s'échappe sur une interminable gauche. Après un bottom-turn réalisé in-extremis, il disparaît derrière un massif rideau d'écume. Alors qu'on aurait pu le croire rattrapé par le foam-ball ou victime d'une erreur technique au vu de la vivacité avec laquelle l'épaule progressait, le triple champion du monde s'évade juste avant que la section ne se referme sur lui, puis lève les bras au ciel comme un ultime hommage à son frère disparu. 9,30pts : il prend la tête des opérations et file vers le tour suivant.

La tête ailleurs

Cette année-là, c'est Adriano de Souza qui sera sacré maître de Pipeline, devenant par ailleurs le premier Brésilien à remporter la prestigieuse épreuve hawaïenne, dans un Backdoor diminué par une chute de swell et balayé par les vents. Par la même occasion, le natif de Guaruja se verra couronner champion du monde 2015, le chemin de Mick Fanning s'étant arrêté aux portes de la finale. Mais les pensées de l'Australien étaient ailleurs : "Perdre le titre n'a pas été douloureux. À la fin de la journée, je n'avais que Pete dans mon esprit. À la suite de ce heat, j'ai découvert que mes amis d'enfance avaient pris un vol direct pour Hawaii pour me soutenir. Ce jour-là, j'ai perdu. Mais j'ai réalisé que dans la vie, j'étais en train de gagner."

Relire nos chroniques du Pipe Masters :

Didier Piter, l'état de grâce en 2001
Miky Picon, nom d'une Pipe !
- Michael Ho, à la force du poignet (cassé)

               
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