Le photographe Tim McKenna l'affirmait dans un épisode d'Impact Zone Surf Podcast : "Quand on est sur l'océan, dans les bateaux en train de shooter des vagues, il faut toujours s'attendre au pire. Se dire que ça va arriver et que ce n'est qu'une question de temps. C'est ce que j'ai appris en passant des journées entières à l'eau sur des bateaux."
Samedi dernier, quelques équipages en ont fait la malencontreuse expérience sur le North Shore d'Oahu. Au cours d'une journée qualifiée d'historique et rythmée par un swell d'une ampleur inédite, nombreux avaient coché l'option d'un outside reef au large de la plus peuplée des îles hawaïennes. Mais voilà, à conditions météorologiques exceptionnelles, événements exceptionnels.
Un concours de circonstances
Dans une baie qui a rarement accueilli des ondes aussi massives ces dix derniers hivers, ils étaient nombreux à vouloir leur part du gâteau. John John Florence a démarré sur une bombe, devant les yeux de Kelly Slater et tout un contingent de chargeurs. Tout comme Koa Rothman, Kohl Christensen ou Grant Baker. Puis vint le moment où une série plus imposante que les autres a levé au large et a barré l'ensemble de la crique.
Dans ce genre de conditions, savoir anticiper et prendre les devants pour désamorcer d'éventuels imprévus est essentiel. Et parfois, malgré toutes les précautions appropriées pour réduire au minimum les risques, ça ne suffit pas. Ainsi, ils ont été nombreux à se faire surprendre par cette série "fantôme", inattendue, plus grosse que les autres. Depuis une passe qui atteint sa limite absolue et face à cette onde qui ne cessait de gonfler jusqu'au point critique du déferlement, quelques-uns ont choisi de rebrousser chemin et prendre le chemin du rivage. D'autres ont préféré aborder le problème de face et tenter leur chance.
Parmi eux, le duo Cam Richards/Ryan Moss (le jet-ski noir sur la vidéo). Le premier, originaire de Caroline du Sud aux États-Unis, est un visage familier du North Shore, véritable virtuose dans les barrels. Le second est un photographe talentueux, qui a grandi en Californie et fige régulièrement la bestialité de Pipeline. Malgré leur expérience, ils ont été pris au piège et ont vu leur jet-ski décoller de plusieurs mètres au moment de passer par dessus la première vague de la série.
"Je me souviens avoir dit : 'Putain, je suis paralysé.'"
Nos confrères de Magicseaweed ont contacté Ryan, actuellement au "Queen's Medical Center" d'Honolulu où il soigne une fracture par compression de 50% d'une de ses vertèbres lombaires, ainsi que d'autres contusions mineurs. Il raconte.
"Je n'avais jamais vu de vagues comme ça à Oahu. Cam faisait un travail extraordinaire pour me mettre au bon endroit au bon moment. Puis ce set est arrivé et a surpris tout le monde. Je me suis dépêché de ranger mon appareil photo dans mon sac étanche et j'ai dit à Cam : ''Dégage de là''. Ensuite, je me souviens seulement de cette sensation d'apesanteur, et le temps qu'on a mis à redescendre qui m'a paru vraiment long. [...] Il n'y avait pas de poignée sur le ski, donc je ne pouvais pas me lever et m'accrocher. J'espérais que mes jambes absorberaient une partie de l'impact. Ensuite, j'ai entendu un grand bruit sourd et j'ai eu l'impression que le ski s'était plié en deux. La douleur était intense dans mon dos et je sentais des picotements dans les orteilles. Je me souviens avoir dit : "Putain, je suis paralysé."''
Récupéré par Daniel Russo, Ryan a été transporté vers l'embarcation de Bryan Phillips et envoyé à l'hopital. Quant à Cam Richards, contacté par Magicseaweed, il a répondu : "Je veux juste confirmer que nous n'étions pas sur le jet-ski blanc, mais un des noirs. Je suis très heureux d'entendre que Ryan va bien. J'ai fait de mon mieux pour nous protéger pendant le chaos, et les choses ont mal tourné. Je me sens mal pour Ryan, mais je sais qu'il est de bonne humeur et qu'il reviendra plus fort et mieux."
Réalisation : Mark Mahannah (@highseas_plank)